Tout pour le lefien...
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La responsabilité du retrait d'Air France-KLM des négociations pour le rachat de la compagnie aérienne nationale incombe entièrement au "patriotisme économique" du futur président du Conseil et à la démagogie des grandes centrales syndicales.
Maintenant, ils vont être contents, les "défenseurs de la nation", les "hérauts de l'emploi", le Parti de la liberté qui a remporté les élections et le syndicat qui vient de perdre la face. Le retrait d'Air France signifie la fin d'Alitalia et signe la défaite de l'Italie.
Ainsi se scelle le sort d'une entreprise appauvrie et pillée par des décennies de mauvaise gestion financière et d'erreurs politiques. Un "trou noir", qui a coûté 15 milliards d'euros en quinze ans – 270 euros par habitant, nouveau-nés compris –, se referme sur le pire des scénarios.
Seuls les hypocrites pourront à présent s'étonner de la rupture décidée par les Français. A quoi pouvait-on s'attendre après qu'un match aussi stratégique que celui-ci a fait l'objet d'une manipulation à des fins électorales ? Qu'espérait-on de l'avenir industriel de notre transporteur aérien national qui s'est joué dans une absurde négociation "péroniste", comme s'il s'agissait d'une banale grève des taxis ? Dans ce malheureux pays, les choses se passent, hélas, ainsi. Mais dans le reste de l'Europe, manifestement, le marché a encore ses règles, ses délais, ses effets.
Les responsables de cette cuisante défaite du système Italie ont un nom et un prénom. Sur le front politique, Silvio Berlusconi a brillé par l'insoutenable légèreté avec laquelle il a manié l'affaire Alitalia-Air France, et par l'insupportable cynisme avec lequel il a agité le drapeau de l'"italianité" d'Alitalia pour des banales raisons de marketing électoral. Sa croisade antifrançaise n'a eu ni frontières diplomatiques, ni limites éthiques. Dans un tourbillon d'annonces aussitôt démenties, il a posé des véto à tout va. Il a inventé des regroupements bancals d'entreprises intéressées à une reprise. Il a mis en jeu des concurrents imaginaires, comme l'Aeroflot de l'ami Vladimir Poutine, qui s'est gentiment prêté au jeu. Le PDG d'Air France, Jean-Cyril Spinetta, n'a que trop longtemps supporté les rodomontades du futur président du Conseil ; au lieu de perdre du temps et d'encaisser un refus de la part du nouveau gouvernement, il a préféré anticiper.
Sur le front syndical, les responsabilités sont encore plus grandes. Les leaders des grandes centrales ont montré une inacceptable myopie à affronter la crise d'Alitalia, crise qu'ils ont par ailleurs toujours contribué à alimenter. Pendant des années, ils ont utilisé la compagnie comme une zone franche, où les niveaux de salaires et les quotas de salariés étaient la seule "variable indépendante" de tous les autres paramètres de l'entreprise, de l'efficacité du service à la productivité. Les centrales syndicales se sont distinguées pour l'intolérable démagogie avec laquelle elles ont essayé jusqu'à la dernière minute d'entraver le plan industriel du seul partenaire au niveau mondial qui avait accepté de mettre les mains dans le cambouis du désastre d'Alitalia. A l'enseigne du corporatisme le plus insensé, ils ont prétendu sauver Alitalia Cargo, malgré ses 135 pilotes pour une flotte de 5 avions et un chiffre d'affaires de 260 millions d'euros pour 74 millions de pertes ; et Alitalia Services, qui aurait dû être reprise par la holding publique Fintecna. Là aussi, Spinetta a préféré anticiper, et tans pis pour les syndicats.
Le gouvernement sortant de Romano Prodi n'a pas géré au mieux cette privatisation. Mais il a au moins eu le mérite d'ouvrir le dossier, après une législature entière au cours de laquelle le précédent gouvernement Berlusconi s'est bien gardé de le faire. Et celui d'avertir tout le monde une semaine avant les législatives des 13 et 14 avril : "Il faut donner un signal clair, car si la décision est reportée au-delà des élections, c'est l'administrateur judiciaire." Maintenant, Alitalia vole vers le gouffre. Dans ses caisses, la compagnie a de quoi tenir un mois, pas plus. Le Conseil des ministres qui se réunit demain, le mercredi 23 avril, peut faire deux choses : approuver le prêt-relais de 100 millions d'euros qui lui permettra de gagner un peu de temps et décider si la compagnie doit faire appel à un administrateur judiciaire.
Quelle que soit l'issue, c'est une dure leçon pour tous : pour le leader du centre droit, qui devra à présent éviter la faillite après avoir démontré toute son improvisation politique et son retard face aux défis de la libre concurrence ; pour les leaders syndicaux, qui n'ont pas été capables de saisir la "dernière chance" et ont fait preuve d'un irrattrapable déficit culturel face aux logiques de la mondialisation.
Source : Courrier International
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Je suis sur que Silvio Berlusconi laisse couler Alitalia pour créer une nouvelle compagnie dont il sera actionnaire prinçipale...a suivre.
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